Partie 1 : Fonctionnement et principes du système démocratique
Définition et histoire
Mot d’origine
grecque, la démocratie tire son sens étymologique du grec « demokratia » pouvant
être traduit par l’expression "pouvoir du peuple" (demos :
peuple, kratos : pouvoir, autorité).
La démocratie tire ses origines de deux (02)
réformes majeures engagées par Clisthène dans la Grèce antique autour du ve siècle av. J.-C. :
- Une « Boulè » regroupant environ 500 citoyens tirés au sort, chargés de recueillir les propositions de loi présentées par les citoyens, puis de préparer les projets de loi ;
- d'autre part, l'assemblée des citoyens (Ecclésia), exemple type de la démocratie directe.
On comprend
donc qu’à l’origine, la démocratie athénienne était une démocratie directe sans
représentation dans laquelle tous les citoyens avaient droit de participer aux
prises de décision publique.
Avec
l’évolution des temps, aux compétences « limitées » du citoyen et à la taille de l’Etat (contraintes démographiques), la « démocratie » va
se muer en un « régime représentatif ».
L’argument
pour plusieurs comme certains penseurs en France, « les citoyens n’ont
ni assez d’instruction, ni assez de loisir, pour vouloir s’occuper directement
des lois qui doivent gouverner la France ; ils doivent donc se borner à se
nommer des représentants. […] Les citoyens qui se nomment des représentants
renoncent et doivent renoncer à faire eux-mêmes la loi ; ils n’ont pas de
volonté particulière à imposer. S’ils dictaient des volontés, la France ne
serait plus cet État représentatif ; ce serait un État démocratique. Le
peuple, je le répète, dans un pays qui n’est pas une démocratie (et la France
ne saurait l’être), le peuple ne peut parler, ne peut agir que par ses
représentants. ». Emmanuel-Joseph
Sieyès (corédacteur de la constitution
française),
Discours du 7 septembre 1789.
Emmanuel-Joseph Sieyès, l’un
des pères de la Révolution française, avait bien compris la différence
fondamentale entre un « gouvernement
représentatif » (où les citoyens se donnent des élus) et un « gouvernement démocratique » (qui
supposerait un régime direct d’assemblées générales exerçant le pouvoir
souverain.
Plus, aux 18ème
et 19ème, le suffrage censitaire est imposé. Et comme disait Emmanuel
Sieyès : « le vote est une fonction et que, par conséquent,
seuls les individus ayant les capacités (intelligence, niveau économique) d’exercer
cette activité doivent le faire ».
Le suffrage est donc réservé seulement aux citoyens actifs et riches. On
aboutit donc aux régimes ploutocratique et aristocratique.
Avant d’aller plus loin et pour mieux comprendre
les développements suivants, il est bon à ce stade et nécessaire de préciser
que la démocratie est un système politique.
Alors la question est : Qu’est ce qu’un
système politique ?
Systèmes politiques
Selon le lexique des sciences politiques: vie et institutions politiques, un système politique est un ensemble organisé et stable d'institutions, de règles et d'acteurs autour desquels s'organisent les activités politiques dans le cadre de l'Etat. Autrement, c'est un mode
d'organisation d'un Etat. Il désigne les grandes
catégories d’organisation des pouvoirs publics.
Un système politique comprend
notamment le régime politique, la structure économique (modèle économique),
l’organisation sociale, etc. Un système
politique est donc une catégorie plus générale qui prend en compte des éléments
d’ordre idéologique ou/et socio-économique.
Il existe
diverses écoles de classification des systèmes politiques, mais pour cette
étude, nous retiendrons l’approche de Montesquieu qui établit trois espèces de gouvernement (système
politique): le monarchique (1), le despotique (2) et la république (3).
- Le système monarchique
Dans le système monarchique, l'État est
dirigé par une seule personne qui gouverne et possède donc le pouvoir souverain
et exerce sa fonction avec des lois fixes et établies. Le principe de ce
système est l’honneur, l’attrait
pour la reconnaissance sociale ; le prince ne peut demander aux hommes de faire
quelque chose qu’ils seraient incapables de faire en raison du déshonneur.
On peut distinguer plusieurs
monarchismes :
- Monarchie de droit divin : le monarque est le représentant de dieu sur terre. Dieu lui a donné le pouvoir.
- Monarchie absolue : le roi détient tous les pouvoirs sans réels contre-pouvoirs.
- Monarchie constitutionnelle : les pouvoirs du roi sont encadrés par la constitution. On peut citer les monarchies parlementaires (Espagne, Royaume-Uni, Norvège, Suède…), les monarchies électives, les duchés, les émirats, les principautés,
- Tyrannie : C’est un régime où seul l’intérêt du tyran compte. Le Tyran se sert des sujets de façon abusive afin de satisfaire son propre intérêt et non pour le bien commun
2. Le système despotique
Dans le système despotique, la
souveraineté est exercée par une
autorité unique (une seule personne ou un groupe restreint) qui gouverne, mais
sans règles préétablies, donc par ses caprices et sa propre volonté.
Ce système passe outre les
droits de débat, d’opposition ou de remontrance des pouvoirs constitués pour
imposer certaines réformes dans les systèmes politiques et la société. Ce
système peut se muer très rapidement en dictature, en autocratie ou
totalitarisme qui
n'admet aucune opposition organisée.
Ce système est caractérisé par :
- L'autorisation de l'existence d'un seul parti (Parti Unique) contrôlant l'État, dirigé idéalement par un chef charismatique
- La présence d'une idéologie imposée
- Un contrôle de la population allant jusqu'à remettre en cause la liberté de penser
- Un monopole des forces armées et des moyens de communications utilisés pour la propagande, l’embrigadement des consciences
- Contrôle de l’économie
- « culte du chef » (de la personnalité)
- Un recours à la terreur
- L’instauration d’un système de pensée unique hors duquel l’on est considéré comme ennemi
Le principe de ce gouvernement est la crainte, qui sert généralement dans
les dictatures.
3. Le système républicain
Le système républicain est un régime dans
lequel tout ou partie du peuple possède la souveraineté populaire. Le principe
de ce gouvernement (républicain) est la
vertu, c’est-à-dire le civisme qui signifie que l’homme accorde plus
d’importance à l’intérêt général et à la nation qu’à son propre intérêt.
L’amour des richesses est inconcevable dans un tel régime, les valeurs étant
pures.
Le gouvernement républicain peut se
subdiviser en deux types :
- oligarchique (gouvernement de quelques uns)
- et démocratique (gouvernement de tous).
Dans
une République démocratique, le pouvoir (la souveraineté) est détenu par le peuple (et
non une partie). Selon Périclès repris par Abraham Lincoln, la démocratie est « le
gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple ». Ainsi, pour certains
penseurs comme Jean Jacques Rousseau : « la
souveraineté ne peut être représentée, par la même raison qu’elle ne peut être
aliénée, elle consiste essentiellement dans la volonté générale et la
volonté générale ne se représente point. »
La Démocratie ne
peut donc qu’être directe (auto-gestion) c’est-à-dire, le peuple exerce
directement (son) pouvoir et adopte lui-même les lois et décisions importantes
et choisit lui-même les agents d’exécution, généralement révocable. Ou alors,
elle est participative (ou
semi-directe) avec un régime de partage et d’exercice du pouvoir fondé sur
le renforcement de la participation du peuple à la prise de décision politique
Dans une République oligarchique, seule une minorité unie
par des liens familiaux, des liens claniques ou des intérêts communs et formant
une classe dominante dispose de l’autorité et de la souveraineté.
Le système oligarchique peut se
transformer en :
- Aristocratie : régime des meilleurs
- Ploutocratie : régime des plus riches
- Technocratie : Régime des scientifiques et techniciens
- Gérontocratie : Régime des Anciens
- Partitocratie : régime des partis politiques
On comprend qu’une république
oligarchique avec toutes ses dérivées ne peut donc pas être considérée comme
une république democratique.
Au regard de tout ce développement, on peut retenir que la démocratie est en effet ni plus ni moins que le pouvoir direct (krátos, en grec) par et pour le peuple (le dêmos) et non une partie exclusive du peuple. Ainsi, la démocratie s’oppose à la monarchie (absolue) et à toute forme d’oligarchie.
À l’observation, le
« régime représentatif » appelé abusivement « démocratie
représentatif » et même plusieurs de nos républiques sont lions d’être des
démocraties d’autant qu’elles concentrent le pouvoir dans les mains d’une élite
politique.
En
cela, Rousseau pensait à raison que déléguer son pouvoir à des représentants
revient pour le peuple à aliéner sa liberté puisque rien ne garantit que la
volonté des représentants soit fidèle à la volonté générale.
On comprend donc que la
représentation dans une démocratie entraîne absolument la
« captation » de celle-ci dans une oligarchie élective qui se
substitue au peuple souverain.
Dans ce
contexte, la démocratie semi directe ou participative ne serait-elle pas la seule « vraie »
démocratie et la mieux adaptée à notre environnement politique au regard des exigences
et principes du système democratique ?
Les principes du système démocratique
- La souveraineté populaire (pouvoir du/au peuple)
- La séparation des pouvoirs (législatif, exécutif et judiciaire): celui qui décide des lois (pouvoir législatif ou parlement) ne peut pas être celui qui les applique (pouvoir exécutif ou gouvernement); une troisième instance séparée est nécessaire pour juger de la bonne application des lois (pouvoir judiciaire)
- Le respect des libertés fondamentales
- Le pluralisme politique et la diversité de l’offre politique
- La règle de la majorité assortie des garanties des droits humains
- La reconnaissance de l’opposition
- La régularité des élections et l’alternance
- La représentation proportionnelle
- L'existence d'une Constitution qui définit et protège les droits et les libertés des citoyens et habitants d'un pays ainsi que l'organisation des institutions.
- La consultation régulière du peuple
- La concertation
- Referendum local et national
- Initiative populaire législative et pétition
- La co-élaboration
- Liberté d’opinion
- Le débat
- Le consensus
De ce qui précède, comment caractériser
notre système politique (en Afrique)?
Sommes-nous
dans des républiques démocratiques ou dans des systèmes aristocratiques électifs de constitution,
établissant une partitocratie oligarchique (gouvernement d'un petit nombre
et/de partis politiques) soutenu par une ploutocratie (gouvernement des plus
riches), notamment des les rapports de l’État et les autres acteurs de la société (partis de l'opposition, société civile, médias, communautés, etc.) ?
A suivre pour les parties 2 et 3
Magloire N'DEHI
Instructif
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